Wednesday, December 12, 2007

A Titre Provisoire - Les 20 ans de la Compagnie Kéléménis (suite)


D’abord le corps. Non. D’abord le lieu. Non. D’abord les deux. Tantôt l’un ou l’autre. Tantôt l’autre ou l’un. Dégoûté de l’un essayer l’autre. Dégoûté de l’autre retour au dégoûté de l’un. Encore et encore. Tant mal que pis encore. Jusqu’au dégoût des deux. Vomir et partir.
C’est sur ce texte que débute le troisième solo de Françoise Leick. Il est signé Samuel Beckett. Une voix monocorde récitera pendant 1h15 une adaptation de Cap au pire. Cela pourrait d’ailleurs donner le titre du spectacle (ou de la soirée). Il faut imaginer une salle et une scène entièrement plongées dans la pénombre, une pénombre profonde, parfois éclairée par un ou deux projecteurs, dont la puissance est si faible qu’ils n’offrent que des halos de lumière grisâtre sur le plateau. Dans ces halos, on croit parfois distinguer une forme, qui vaguement bouge, ou pas. Difficile de garder patience. Il s’agit de prêter l’oreille, de tenter de comprendre ce qui s’échappe de cette flopée de mots souvent absurde, d’écarquiller les yeux pour essayer d’apercevoir une ombre, un geste, ou l’ombre d’un geste, et de lutter contre l’envie irrépressible de dormir, ou de partir.
Une soirée mémorable donc, durant laquelle s’enchaînent trois soli pour une même danseuse : Queen de Julyen Hamilton, Urgence de Karim Sebbar, et Worstward ho de Maguy Marin. Trois univers décalés, à la lisière de l’intéressant. Le premier opus aurait pu être charmant, tous les ingrédients étaient réunis pour : une bande sonore étrange, l’utilisation de la vidéo, des éléments scénographiques épars, une danseuse professionnelle. Mais jamais les portes du captivant ne sont poussées. A un moment pourtant, elles sont effleurées : un tas de farine posé au sol, sur une bâche. Françoise Leick s’en approche, et entreprend de jouer avec, élégamment. Apparaissent alors des sculptures et des figures éphémères. Puis la danseuse se vautre dans la poussière, et la magie retombe vulgairement.
Quant au second spectacle, il est tout simplement le plus risible de tous. Vêtue d’une blouse blanche et de sabots d’infirmière, l’interprète évolue entre ventilateurs et sacs plastiques immaculés, en choisit un, et s’en coiffe. Suit alors un numéro de claquettes, le visage à couvert. Cette image était censée être poétique. Elle n’a su que déclencher une sorte de fou rire général, même si quelques spectateurs ont su rester stoïques. Puis la chorégraphie se poursuit, pieds nus et en robe de soirée, avec le couvre-chef toujours en place. Commenter cela serait lui donner de l’importance.

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