Thursday, December 04, 2008

Luxe n°1 - Investir




Elle est heureuse, elle doit l'être. Un leitmotiv, comme une injonction, tel le "mariez-vous", scandé tant de fois, dans divers contextes, au début de la pièce. L'ironie s'impose d'emblée.

Il et elle sont assis face à face de part et d'autre d'une table-métaphore, qui est à la fois un meuble "bien designé", symbole de réussite sociale, un ventre fertile, une table de torture, et une boîte à phantasmes.

Il sont face à face et regardent ce qu'ils sont devenus, au moment où ce qui les a réunis ne signifie plus rien. L'amour n'existe plus, l'habitude le remplace. Le plaisir n'existe plus, juste son simulacre persiste, un petit jeu qui devient de plus en plus pervers et douloureux.

Un enfant est né de leur amour déchu. Il évolue au milieu de leurs déchirements absurdes et inavoués. Gravement, il joue et observe le manège, impuissant. Il grandit et se nourrit de ce désabusement.

Les spectateurs sont situés de part et d'autre d'une scène en U, étrangement contorsionnée. En son centre, la fameuse table, qui ménage deux étroits passages pour la circulation des acteurs. Leurs corps sont d'ailleurs contraints dans leurs déplacements, dans leurs mouvements. Les vêtements sont élégants mais entravent les gestes. Chaque chose est à sa place, ici un aquarium haut perché, là un micro suspendu, dédié aux délires verbaux.Une maison propre est froide est ainsi suggérée. Tout le monde y est bien mis en boîte. Pas un mot plus haut que l'autre. Tout se résume à la façade. Et parfois un cri, un grincement, s'échappe, car cette vie lisse et indifférente est inacceptable.

Flotte dans l'atmosphère comme les traces d'un ancien désir, très vite étouffé par des questionnements amers. Les personnages se demandent pourquoi se sont-ils choisis. Etait-ce un effet du hasard ? Ils se demandent s'ils ne se sont pas choisis pour se soustraire à la solitude. La tyrannie de l'attachement est également évoquée.

Les faux semblants, les quiproquos, les mensonges et l'érotisme sont violents. Les gifles claquent au milieu des sourires de circonstance. C'est-à-dire que le jeu des acteurs est très physique. L'essentiel repose sur les corps et leurs tensions. Le texte est sobre, tranchant, presque hâché. La substance dramatique est mâtinée de séquences vidéos tragi-comiques, balançant entre l'insensé et le dérisoire, le tout entrecoupé de citations aigres-douces, en accord avec le ton général.

Il est heureux, il doit l'être.


Luxe n°1 - Investir, écrit et mis en scène par Geoffrey Coppini.

Interprété par : Lou Colombani, Paulo Guerreiro, Carlos Martins, Clémence Schreiber.

Mercredi 3 et jeudi 4 décembre 2008 au théâtre Montévidéo, 3 impasse Montévidéo, 13006 Marseille.


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